Ouvrir une guest-house en Inde, mode d’emploi

Ouvrir une guest-house typique ou un hôtel de charme dans un quartier pittoresque… C’est l’une des options préférées des candidats au changement de vie. Certain(e)s finissent par sauter le pas, comme Clara Kanner, co-fondatrice avec Coraline Joveneaux, de Bed & Chaï, une guest-house de charme à Delhi.

Coraline Joveneaux et Clara Kanner

Coraline Joveneaux et Clara Kanner

Au départ, ce n’est pas très compliqué….

Avant de se lancer, insiste Clara « il faut avoir vécu en Inde. Entreprendre ici, c’est possible, mais complexe. Il faut voyager, comprendre le système, sinon tout est plus long et beaucoup plus compliqué. Il faut rester très ouvert à cette culture complètement différente de la nôtre. Impossible de se repérer par rapport à la France, rien n’est pareil».

 

On peut commencer avec un capital assez bas, à condition d’être bien accompagné par un bon expert-comptable (chartered accountant ou CA) qui aura un rôle capital pour monte le projet. La comptabilité en Inde est très différente de la France : tous les comptables ont une double comptabilité pour les entreprises. Ça permet d’ajuster les choses en cas de besoin.

 

Il faut ensuite s’armer de patience, comprendre la législation, décortiquer chaque étape avec l’administration. Obtenir des informations est difficile : on refait souvent la même erreur avant de comprendre où on s’est trompés.

 

Il faut aussi savoir que tout se négocie : loyer, comptable, électricien… D’autant plus que, pour des occidentaux, les prix sont plus élevés que pour les Indiens.

 

C’est souvent plus simple de travailler avec un bon company secretary (CS), qui nous aide pour toutes les démarches, notamment la paperasse et l’administration.

 

Savoir suivre les règles locales…

Par exemple, pour obtenir la licence de guest-house, si vous passez par la voie normale et suivez les règles, cela vous prendra énormément de temps. Avec le risque, in fine, de ne rien obtenir du tout et de devoir tout recommencer depuis le début.

Soit vous avez de très bons contacts, des gens bien placés qui peuvent vous aider à obtenir les documents nécessaires, soit vous avez recours à la corruption, qui est très courante ici. Les Indiens savent qu’il faut payer pour obtenir une réponse positive. Et il ne faut pas hésiter à demander aux amis d’amis, qui peut-être sauront qui appeler pour obtenir des résultats.

 

En ce qui nous concerne, nous sommes en train de résoudre la situation. Mais chaque démarche, c’est un bakchich de plus pour nos interlocuteurs. Le jour où nous obtenons la licence, c’est un revenu en moins pour eux. Ils ont donc tout intérêt à ce que le système dure aussi longtemps que possible.

 

Ceci dit, la boite est légale, on paye les taxes et les impôts. Tant que nous n’avons pas une réponse officielle qui nous interdit d’exercer, la guest-house fonctionne. Par ailleurs, on connaît le voisinage, la police. Tous nous laissent travailler sans problèmes. Pour le moment tout va bien. Mais nous avons besoin de la licence : elle nous couvre en cas d’accident d’un voyageur, d’incendie…

L'une des chambre de la guest-house  Bed & Chaï

L’une des chambre de la guest-house Bed & Chaï

 

Travailler avec les Indiens : qu’est-ce qui change ?

  • Le langage : beaucoup d’Indiens parlent très bien anglais dans le monde des affaires. Dans notre branche, c’est loin d’être le cas. Nous avons pris des cours de hindi, et c’est un gros avantage à Delhi pour parler avec les plombiers ou les employés….
  • La manière de travailler : les Français anticipent beaucoup, se fixent des échéances. En Inde, tout se fait à la dernière minute, on reporte au lendemain, rien ne semble jamais grave. Mais les Indiens sont beaucoup plus flexibles que les Français. Si les projets ne sont pas terminés dans les temps, les partenaires sont moins exigeants sur les délais. En cas de besoin, ils se plient en 4 et savent travailler dans l’urgence. Si on s’entend bien, ils peuvent même faire passer notre projet en priorité.
  • La religion et la famille sont super importants ici. Et cela se sent dans le travail. Il faut le savoir : pour certains festivals, tout le monde prend ses congés en même temps. Lorsqu’ils se marient, ils posent un mois de vacances et travaillent à mi-temps pour préparer la cérémonie. En France, ça ne passerait pas. Mais nous sommes habituées, nous anticipons : à certaines périodes de l’année, nous savons que nous serons seules à faire tourner l’hôtel. A côté de ça, nous pouvons retourner en France à Noël et compter sur les employés pendant notre absence. En cas de besoin, on peut leur demander de travailler le dimanche, et de changer de jour de repos. Cela ne pose pas de problème.
  • La loyauté : C’est difficile de fidéliser les employés. Les salaires locaux, notamment les petits salaires, ne sont pas très élevés, les contrats de travail sont peu respectés. Par conséquent, les employés peuvent partir du jour au lendemain parce qu’on leur a proposé quelques roupies de plus ailleurs. Il faut le savoir et prévoir un plan B quand un employé ne vient pas travailler un jour. Surtout quand on se rend compte qu’il est rentré dans son village et ne reviendra pas avant plusieurs semaines. Eux n’ont pas peur de perdre leur boulot, ils savent qu’ils en retrouveront en revenant. A Bed & Chaï, nous leur avons proposé une assurance maladie, pour les fidéliser.

L’avantage, en Inde, c’est qu’il y a moins de règles, de formalisme et plus de sensibilité. On se connait bien et on s’entend tous bien. Lorsque nos employés se marient, ils nous invitent au mariage, comme si on faisait partie de la famille. En France, nous sommes plus individualistes. Ici, nous travaillons comme dans une grande famille.

Lien Permanent pour cet article : https://www.theindianproject.com/guest-house-mode-emploi/

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

%d blogueurs aiment cette page :