C’est à tort que l’Inde a mauvaise réputation explique Mathias Coisne, expatrié en Inde depuis 2013. Il travaille aujourd’hui à convaincre les entreprises de tenter leur chance sur le sous-continent en sécurisant celles qui y sont déjà implantées.
Une expatriation volontaire en Inde
« Je suis arrivé en Inde grâce à ma fiancée, qui est depuis devenue mon épouse. Elle est originaire de Bombay. Lorsque j’ai terminé mes études à l’école Vatel, en Thaïlande, elle m’a proposé de venir en Inde, pour travailler avec son père dans l’immobilier.
J’ai décidé de tenter ma chance. Je connaissais déjà l’Asie, j’avais vécu 4 ans en Thaïlande. Malgré tout, l’Inde a été un véritable choc culturel. Et la réputation de l’Inde déjà à l’époque n’aidait pas.
Je suis devenu l’assistant de mon beau-père. Je l’accompagnais lors des réunions qui se déroulaient en …hindi ou marathi ! Autant dire que je ne voyais pas bien ce que je pouvais apporter. Aussi au bout de 6 mois, j’ai décidé de me lancer à mon compte toujours dans l’immobilier à destination des expatriés.
Entrepreneur… dans l’immobilier
Au départ, je me suis spécialisé pour les étudiants en colocation dans le quartier de Bandra Ouest. Je ne me voyais pas contacter les entreprises françaises. D’autant plus que Mathilde, elle-même spécialisée dans la relocation était là et je ne voulais pas lui faire de concurrence.
J’ai donc décidé de contacter les entreprises étrangères. J’ai approché des ambassades, d’autres consulats. Dès les 6 premiers mois, j’ai eu de nombreux clients… mais aucune transaction concrète.
Mon partenaire de Delhi m’a envoyé des clients. Rapidement, j’ai obtenu mon premier gros contrat avec le consulat de Norvège qui cherchait un appartement de standing à Bandra. Cela s’est révélé une expérience intense. À tout moment, je pensais que ça allait tomber à l’eau et finalement, tout s’est bien passé. J’ai commencé à travailler avec l’ensemble des diplomates norvégiens et cela m’a permis de me démarquer de la concurrence.
En parallèle, j’ai eu des clients par le bouche-à-oreille. J’ai travaillé avec des entreprises comme L’Oréal, Arkema. De son côté, Mathilde a quitté Mumbai, ce qui m’a permis d’avoir une plus grande marge de manœuvre.
J’avais alors comme concurrents de gros agents immobilier. Et moi, j’étais seul pour assurer le commercial, le marketing, la promotion, les négociations…
Mettre à profit son expérience pour les entreprises françaises
Je me suis rendu compte qu’il y avait eu une grande part de chance… et beaucoup de travail pour attirer la chance en question. Dans l’immobilier, tout peut tomber à l’eau pour des facteurs que vous ne pouvez absolument pas maîtriser. Cela m’a appris l’humilité, une qualité nécessaire quand on travaille en Inde.
Il me semble important aujourd’hui de partager cette expérience avec les entreprises françaises qui veulent s’implanter en Inde. Et de redorer le blason l’Inde victime de sa mauvaise réputation. Plutôt que de continuer seul, j’ai rejoint le cabinet Udyen Jain & Associates.
UJA n’est pas un cabinet comme on peut en trouver des milliers en Inde. En plus de 20 ans, UJA a développé une grande expérience de l’implantation des entreprises étrangères en Inde, des problématiques qui peuvent se poser quel que soit le niveau d’implantation des entreprises en Inde. Et Monsieur Jain a une culture européenne qui permet de créer une véritable relation de confiance, fondée sur la compréhension, avec ses clients.
Changer la réputation de l’Inde
Avec Lucile Guéguen, responsable du marché français pour UJA, nous accompagnons les entreprises françaises en Inde sur leurs différentes problématiques : comptabilité, conseils en stratégie set mises en relation entre entreprises françaises et indienne – dans le cadre de joint ventures, ou de recherche de distributeurs…
Lucile se concentre sur l’accompagnement d’entreprises françaises qui pensent venir en Inde et moi sur l’accompagnement des entreprises françaises déjà établies en Inde, sur les questions de comptabilités, taxes, transfert pricing… De nombreuses sociétés qui arrivent en Inde sont mal conseillées ou mal accompagnées. Ce qui peut se révéler dramatique. Ainsi, s’il y a des problèmes de taxes – et vu la complexité du pays, cela peut arriver facilement – les entreprises peuvent se retrouver à devoir payer de grosses amendes pour des erreurs commises par leurs correspondants sur place.
Cette image ne joue pas en notre faveur, même si le système depuis quelques années a été simplifié pour le rendre plus compréhensible.
Or encore aujourd’hui, de nombreuses entreprises sont prêtes à s’installer partout, sauf en Inde, que ce soit à cause de mauvaises expériences qu’elles ont eues ici et ne veulent pas revenir. Ou à cause de la mauvaise réputation du pays. C’est dommage au regard des opportunités du pays.
Savoir prendre son temps
L’Inde gagne à être connue. Mais ce n’est pas un marché qui s’investit du jour au lendemain. Il faut venir sur place, comprendre le marché, ses composantes… Personnellement, j’ai mis 2 ans dont 6 mois avec de nombreux clients mais aucune transaction avant de voir mon activité décoller. Et j’ai appris aussi qu’avant d’avoir des clients en Inde, il faut se faire des amis. Les relations ici sont très importantes.
Il ne faut pas être pressé et ni penser obtenir de résultats immédiatement. C’est un pays qu’il faut envisager sur le long terme. Et c’est possible. Les entreprises italiennes par exemple sont en plein boom actuellement. Il faut juste changer sa manière d’envisager le marché. Or les entreprises françaises viennent et veulent faire du business tout de suite. C’est une mauvaise approche. Il faut prendre le temps de comprendre le pays.
Pouvoir échanger sur ce qu’on ne comprend pas
Français et Indiens ne se comprennent pas et souvent, cela bloque.
Les « big 4 » qui accompagnent les grandes entreprises ont les moyens d’organiser des training sur les différences culturelles. Mais parler avec nous directement, c’est aussi simple pour comprendre comment fonctionne l’Inde.
Et notamment que c’est un pays qui permet de commencer petit. Certaines entreprises s’installent directement à Mumbai, paient des loyers pharaoniques avant même d’avoir réalisé le moindre bénéfice. C’est une erreur. Il faut commencer petit et économiquement. Et l’Inde le permet.
Pune plutôt que Mumbai
UJA se trouve à Pune. Et en m’installant ici, j’ai découvert un environnement complètement différent de Mumbai. J’adore Mumbai, mais, par comparaison, Pune est une bouffée d’air frais. C’est moins dense, les gens sont moins stressés. Pune est devenue une smart city agréable à vivre. C’est une facette que l’Inde que je découvre. »