Olivier Lafont, la star française de Bollywood

Devenir acteur à Bollywood, beaucoup en rêvent. Olivier Lafont l’a fait et a même très bien réussi. Figure connue de Bollywood, pour ses multiples rôles (3 Idiots, Guzaarish) ou ses nombreuses apparitions publicitaires, rien ne prédestinait le fils de l’éminent historien spécialiste de l’Inde, Jean-Marie Lafont, à devenir l’étoile montante de Bollywood.
Né, en France, ayant étudié aux États Unis, c’est en Inde où sa famille s’est installée lorsqu’il avait 7 ans, qu’Olivier a tenté sa chance et qu’il a rencontré le succès.

Comment avez vous débuté votre carrière d’acteur ?

J’ai voulu devenir acteur dès on plus jeune âge. J’ai donc poursuivi mes études et pris toutes mes décisions dans ce but. Le tout était de savoir où et comment.

Pourquoi avoir choisi l’Inde pour vous lancer, plutôt que les USA ou la France?

Il se passait quelque chose de très intéressant dans le cinéma indien au début des années 2000, une ouverture, une modernisation et une expansion vraiment marquée. Le cinéma indien était sur le point d’exploser sur la scène internationale. Il y avait aussi une part d’affectif dans mon choix. Je ressentais quelque chose de très fort pour l’Inde à cette époque. Et il y a peut-être une part de destin, puisque c’est ici, à Bombay, que j’ai rencontré mon épouse qui est indienne.

En Inde, vous êtes très connu. Vos origines françaises ont-elles été un atout ou vous ont-elles collé une étiquette ?

Je pense qu’on me considère comme NRI, Non-Resident Indian – ces générations d’Indiens qui ont émigré ou qui sont nés à l’étranger. Mes origines françaises n’ont ni aidé ni nui, en fait, au métier d’acteur. En tant que scénariste, par contre, ça a été utile car mon premier film Hari Om, par exemple, est un film indien avec des personnages français.

Vous avez tourné à l’étranger. Pouvez-vous comparer l’industrie du cinéma indien par rapport à celle d’autres pays ?

J’ai tourné un peu à l’étranger, et les grandes différences que j’ai constatées se situent surtout au niveau de la production. Les productions indiennes se montent un peu plus au pif que les productions occidentales. Les opportunités sont présentes partout, mais en général il faut être sur place pour en profiter. Les films indiens sont produits beaucoup plus rapidement que les films occidentaux, ce qui a de bons côtés … et de moins bons.

Est-il difficile de percer à Bollywood ? Et est-ce encore possible aujourd’hui ?

C’est très difficile. La compétition y est énorme, et la culture est en pleine évolution, ce qui signifie que les repères traditionnels du cinéma indien changent.
Il y a des critères culturels très précis, des manières de jouer très différentes du cinéma occidental, sans compter les attentes du public, ce qui implique de trouver l’équilibre entre la modernité et les traditions. Malgré cela, tout est, bien sûr, possible. Il existe plein de manières d’entrer dans le cinéma : par la publicité, par le théâtre, par la télévision, avec de l’argent, avec des contacts. Mais la clé, c’est de trouver sa propre voie, pour avoir un parcours à succès qui soit aussi artistique et satisfaisant.

Quels conseils pour un jeune étranger qui voudrait se lancer dans le cinéma indien?

Il faut avoir un but précis, une stratégie cohérente, et un esprit ouvert. Au niveau pratique il faut juste contacter les maisons de productions, circuler personnellement et professionnellement, et croiser les doigts. Il n’y a pas une seule formule qui marche, chaque histoire d’acteur est différente.

Faut-il absolument parler hindi comme vous (ou toute autre langue indienne), pour réussir dans le cinéma indien ?

Selon moi, si un acteur étranger veut une carrière d’une certaine durée dans les cinémas indiens il faut un minimum de maîtrise de la langue locale. Entre se débrouiller et être un locuteur quasi-natif, il peut y avoir une variété de petits rôles intéressants pour un étranger, mais rarement des rôles de grande envergure.

Vous écrivez aussi des scenarii et vous recherchez un producteur NRI. Pourquoi un NRI et non un de ceux bien implantés à Mumbai ?

La perspective indienne des NRI (surtout dans le cinéma) et leur expérience sont différentes. Vu le sujet du film, c’est important et logique que le producteur soit d’origine NRI, qu’il vive à l’étranger ou à Bombay. Ceci dit, un producteur avec l’esprit ouvert, qu’il soit indien, NRI, ou même totalement étranger, est le critère de base. Au fond, le cinéma, c’est de l’histoire humaine. Par exemple, je cherche aussi un producteur français pour un autre film que je suis en train d’écrire, une comédie indo-française — avoir un producteur français serait plus logique, mais si un producteur d’une autre origine se présente… J’aime bien garder l’esprit ouvert.

Warrior, le dernier roman d'Olivier Lafont

Warrior, le dernier roman d’Olivier Lafont

Vous êtes également auteur. Warrior, est-ce votre premier livre ?

C’est mon premier roman paru en Inde. J’ai aussi écrit Purgatory, une nouvelle fantastique, et Sweet Revenge, un roman d’amour, qui sont accessibles en France sur Amazon, mais en anglais.

On écrit pour être lu. Et vous souhaitez être lu par qui?

Le public international — pour moi le but est de toucher le maximum de lecteurs, où qu’ils soient. Selon moi, Warrior est aussi une histoire internationale. Il n’est pas nécessaire de connaître l’histoire de l’Inde ou la religion hindoue pour lire le livre. Cela peut se lire comme un roman fantastique normal.

Comment avez vous fait pour être publié chez Penguin – l’une des plus grandes maisons d’édition au monde?

Warrior était un scénario que j’ai écrit avant de venir à Bombay, il y a plus d’une douzaine d’années maintenant. Je suis passé à d’autres travaux, et après quelques temps, je l’ai transformé en roman. Et puis je l’ai encore laissé un peu de temps, à cause du boulot. Quand finalement je l’ai retrouvé et envoyé à Penguin, la publication s’est passée plutôt tranquillement.

Qu’est-ce qui, selon vous, plait à un public indien en littérature ?

Je pense que tous les publics aiment de l’aventure. Que ce soit de l’aventure romantique, policière, fantastique ou intellectuelle, la raison de la lecture est de ressentir de l’aventure. Après, cela dépend du genre de l’auteur, et comment il ou elle retrouve son public.

Votre avenir idéal : plus de livres ou plus de films? Plus de réalisation de films ?

L’avenir idéal serait un équilibre entre les livres et les films, avec un public international. Pour l’instant pas de réalisation, mon intérêt est plus dans les métiers d’écrivain, de scénariste et d’acteur. Au cinéma, je voudrais écrire mes propres films… ce que je suis déjà en train de faire.

Pour en savoir plus ou suivre Olivier Lafont:

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FTO ou l’art du voyage « sur mesure »

Dans le business du voyage en Inde, le principe de FTO-Inde (pour French Travel Organization) est aussi atypique qu’inattendu, comme l’explique Ritu Bernaerts, la co-fondatrice de l’agence.

Une agence à la croisée des chemins franco-indiens

Ritu cofondatrice de FTO, l'agence du voyage sur mesure en Inde

Ritu cofondatrice de FTO, l’agence du voyage sur mesure en Inde

A l’origine de FTO, un double constat : des Français partis en Inde regrettaient de n’avoir pas eu assez de temps pour s’imprégner de la culture du pays. Et, à l’inverse, les deux fondatrices de l’agence, Ritu, indienne mariée à un Français et Séverine, française mariée à un Indien, avaient pris l’habitude d’organiser des visites insolites afin de faire découvrir une France inattendue à la famille et aux amis indiens de passage.

Moralité : face aux regrets des premiers et l’enthousiasme des seconds, «il y avait quelque chose à créer pour que les deux populations apprécient l’autre pays à sa juste valeur. C’est comme ça que FTO a démarré il y a 6 ans» explique Ritu.

Face aux spécialistes de l’Inde, aux géants du voyages ou autres tours operators, la spécialité de FTO, ce sont des voyages «personnalisés à outrance».

Pour les Français, des spécialistes du voyage personnalisé

Tout voyage commence par une longue conversation avec les clients, pour connaitre leurs envies. «L’idée est de comprendre leurs motivations pour trouver, dans nos ressources, tout ce qui peut correspondre à la personnalité chacun. Le voyage de l’un ne correspondra pas à l’autre» explique Ritu.

Séverine, associée de Ritu à FTO

Séverine, associée de Ritu à FTO

Les résultats sont étonnants : « une cliente voulait partir en Inde avec ses quatre enfants dont la dernière avait 4 ans. Au départ, c’était juste un voyage de famille lambda. En discutant, il est apparu qu’elle organisait le voyage à la demande de ses enfants, car elle-même avait été adoptée en Inde. Elle n’avait jamais eu besoin d’y retourner, mais au fil des conversations, on s’est rendue compte que si on arrivait à retrouver son orphelinat, ce serait un cadeau exceptionnel pour ses enfants. »

Autre exemple, des clients dont le grand-père, d’origine anglaise a été enterré à l’est de l’Inde sous le Raj britannique. « Nos clients voulaient se rendre sur sa tombe, mais n’avaient pas beaucoup d’informations. Nous avons travaillé ensemble pour rassembler plus de renseignements afin de retrouver sa tombe».

FTO couvre  l’Inde, ainsi que le Bhoutan, le Sri Lanka et le Népal «que nous connaissons par cœur» confirme Ritu.

Pour les Indiens, des voyages d’exception

Quid des voyages pour les Indiens en France ? Répondent-ils au même principe ? Oui et non. Oui, car il s’agit toujours de voyages sur-mesure. Et non, quant au type de clientèle. «On travaille beaucoup en b-to-b. On est dans le haut de gamme et le luxe » avec une clientèle de milliardaires, de stars de Bollywood et autres chefs d’entreprises.

Une approche différente donc, comme avec ce client qui voulait fêter ses 40 ans à Paris avec ses amis. Le défi : «tous connaissaient très bien la ville et voulaient être surpris. Or il fallait savoir ce qui allait les surprendre. Mais ils étaient très difficiles à joindre, même leurs secrétaires n’avaient pas toutes les infos… Et on ignorait ce qu’ils avaient déjà fait. Au final, pendant 3 jours, les invités ont visité de Paris en hélicoptère, dîné dans un château 3 étoiles Michelin, accueilli par le chef en personne à leur descente d’hélicoptère. Ce dernier avait préparé un menu différent pour les convives, selon qu’ils étaient végétariens, vegan, ou sujets à intolérances… Un saut en parachute dans la baie de Somme et un atelier de tatouages pour marquer l’événement étaient également au programme. »

« Nous avons beaucoup de demandes de ce type » reconnaît Ritu. « On ne cherche pas à faire de volume, on mise sur le qualitatif. Nous ne sommes donc pas sur le même marché que les agences de voyages classiques».

Tout en double

Deux pays, deux cultures, deux façons d’envisager le business, tout est sous le signe de la double culture chez FTO.

Une organisation sur deux pays…

Ritu et Séverine sont basées à Nantes. En France, elles fonctionnent à deux, mais travaillant en fonction des projets, elles ont recours à des collaborations en contrat temporaires et à des stagiaires sur de longues durées.

FTO ou French Travel OrganizationEn Inde, FTO a monté un service de conciergerie qui s’adapte en fonction des voyages. Le principe: que les voyages aient lieu en Inde ou en France, Ritu et Séverine, ainsi que leur bureau indien sont disponibles 24h/24.

… pour une gestion réactive

« Nous sommes une toute petite structure. Cela nous permet de nous adapter très vite et d’être pro-actif » explique Ritu. Car FTO n’est pas à l’abri des imprévus. « Si, pour notre client, le voyage en France que nous lui préparons n’est pas prioritaire, il peut très bien y renoncer d’un coup.» Un attentat terroriste comme la tuerie de Charlie Hebdo en janvier 2015, des inondations au Sri Lanka peuvent retarder ou annuler des projets de voyages.

Cela fait partie des risques du métier, mais, reconnaît Ritu, « nous avons créé notre société en pleine crise. Il fallait être un peu suicidaire. » Le risque en valait la peine puisque FTO aujourd’hui, est à l’équilibre et se partage à égalité entre les voyages vers l’Inde et les étrangers qui viennent en France, soit une centaine de voyages par an en moyenne.

Les piliers de FTO : bouche à oreille et réseau

Le premier apporte les clients venus d’Inde, mais aussi du reste du monde (nombre d’entre eux sont des NRI -non resident Indians- installés en Australie, aux Etats-Unis ou encore à Singapour). « Encore aujourd’hui, on est offline, et notre budget marketing est minuscule » reconnaît Ritu.
Et le second est leur outil de travail. Le réseau de Séverine et Ritu, construit au fil des années, leur permet de répondre aux besoins des clients.

« Chaque dossier est une personne et pas un numéro » insiste Ritu. « Nous passons beaucoup de temps à préparer les voyages : il faut comprendre la demande des clients, trouver ce qui leur correspond. Cela prend plus de temps niveau production, mais niveau résultats, c’est passionnant.»

Compliqué de travailler sur plusieurs pays ?

Il y a des avantages et des inconvénients estime Ritu. Et chaque pays a ses bons et ses mauvais côtés. Il faut l’accepter. Mais « dans le monde entier, l’entrepreneuriat a toujours le même problème : il y a toujours plus de difficultés avec les administrations qu’avec le business lui-même. L’administration est plus contraignante, le jargon administratif prend du temps. C’est très compliqué pour les petites structures comme la nôtre, et cela nous prend pas mal d’énergie. Si les choses étaient plus simples pour les entrepreneurs, nous pourrions développer beaucoup plus de projets.»

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Saratha Vilas ou comment le Chettinad peut changer des vies

Le Chettinad a bouleversé la vie de Michel Adment et Bernard Dragon. «On avait envie d’un changement mais on ne pensait pas que ce serait à ce point. On n’a pas été déçu», raconte Michel qui, avec Bernard, a troqué sa vie parisienne pour Saratha Vilas, un luxueux boutique hôtel à Kothamangalam, au cœur du Chettinad, où ils sont les seuls Occidentaux à des kilomètres à la ronde.

Une envie de changement

Comment deux architectes parisiens, qui ont travaillé sur des projets culturels aussi prestigieux que l’Opéra de Pékin ou l’Oriental Art Center à Shanghai, en sont-ils arrivés là ?

La façade de Saratha Vilas

La façade de Saratha Vilas

Au départ, une envie de changer de vie… et un voyage en Inde du Sud. « Un voyage court car nous avions peur de l’Inde, du manque d’hygiène, de la pauvreté. » Et là se produit un premier choc,  « avec tous les antiquaires, des collections de mobilier, d’objets extraordinaires. On a commencé à acheter des meubles pour les envoyer en France par container où on les a vendus à des amis, des connaissances ».

Un hobby qui devient rapidement une habitude. Les voyages en Inde se multiplient : « Nous avions besoin de ce contact avec la matière qui nous manquait sur nos projets. On est venus de plus en plus souvent… Et on n’a pas pu s’en empêcher : on a commencé à dessiner du mobilier et à le faire réaliser au Kerala. »

Et finalement, lorsqu’un poste d’expatrié en Inde se présente, Michel et Bernard sautent le pas et partent s’installer à Chennai. Car les deux architectes ont un plan.

Coup de foudre pour le Chettinad

A force d’arpenter l’Inde du sud de long en large, ils sont tombés sur une région du Tamil Nadu, jusque-là quasi inconnue des touristes et snobée des guides, mais appréciée des antiquaires : le Chettinad.

Une architecture unique

le grand hall de Saratha Vilas, un bijou du Chettinad

le grand hall de Saratha Vilas, un bijou du Chettinad

Le Chettinad, c’est d’abord une architecture mêlant influences tamoule et occidentale. Des dizaines de milliers de petits palais ou de grandes villas rappellent la splendeur passée des populations de marchands, financiers éclairés et cultivés qui ont fait fortune en faisant des affaires dans toute l’Asie du sud-est. «On a l’impression de marcher dans des villes romaines, avec des plans tracés au cordeau, de grandes maisons avec des cours intérieures. On a la sensation d’être transporté dans le temps et, en même temps, de retrouver nos racines » explique Michel.

De projets en projets…

De retour en France, Michel et Bernard s’attellent à l’élaboration d’un projet de coopération internationale culturelle pour préserver et développer le patrimoine du Chettinad. Ils proposent d’inscrire la région sur la liste de veille du World Monuments Fund, une organisation new yorkaise. C’est un premier pas car « personne ne connaissait la région, mais le projet a été remarqué, nous avons été encouragés à continuer, cette fois avec le soutien du bureau de l’UNESCO de New Delhi. »

Une architecture unique au Chettinad

Une architecture unique au Chettinad

La campagne Revive Chettinad Heritage, lancée avec l’Unesco, est un programme de sensibilisation pour la protection et la valorisation de la région. Des coopérations internationales suivent avec l’inclusion dans la liste de veille du WMF et pour finir, la liste indicative du patrimoine mondial. « Notre idée était de continuer à faire notre métier d’architecte et de venir le plus souvent possible pour mettre en place des coopérations internationales. » De rencontres en networking, Michel et Bernard font la connaissance de Francis Wacziarg. « Il nous a dit : “Si vous voulez faire quelque chose au Chettinad, vous devriez monter aussi un projet économique et pas seulement culturel. Justement j’ai entendu parlé d’une maison à louer.” »

Le début de l’aventure Saratha Vilas

Et c’est ainsi que tout a commencé. Bernard et Michel montent une société qui loue la maison. Vient alors le moment de la restauration… et c’est là que les difficultés commencent.

Mettre en œuvre le chantier

« On ne voulait pas s’installer complètement en Inde », explique Michel. « On cherchait un jeune architecte intéressé par la restauration de la maison qui suive le chantier pour nous. Nous avons rencontré beaucoup de monde, fait plein d’essais qui n’ont jamais marché. Et on s’est dit qu’on adorerait faire ce travail. »

Devenus maîtres d’œuvre de la restauration, les architectes apprennent à travailler avec les gens du village « qui venaient le matin pour proposer leurs services et on les embauchait directement. Il y avait des maçons qui connaissaient les techniques traditionnelles. Nous avons aussi notre expérience d’architecte. Nous avons travaillé tous ensemble afin d’en faire la maison qu’on imaginait. »

Et organiser le management

le style Saratha Vilas

le style Saratha Vilas

L’idée est ensuite de monter une équipe, sous la direction d’un manager pour assurer la gestion quotidienne de Saratha Vilas. Là encore, impossible de trouver un bon manager, ni dans le village, ni en dehors. De nouveau, Michel et Bernard s’y collent, même si former les villageois aux métiers de l’hôtellerie n’a rien d’évident. « Les gens vivent sur une natte, mangent sur une feuille de bananier, ils n’utilisent pas de couverts, pas de table, pas de chaises. Tout, dans la villa, était nouveau pour eux. Ils ont appris d’autant plus vite. Eux se lavent dans le bassin du village. La salle de bains était une nouveauté : ils en ont entendu parler, l’ont vu à la télévision dans des films et là, tout à coup, ils en voient une en vrai. Du coup, ça les a bien accrochés et la formation au house keeping a été très rapide. »
Même pour les postes d’encadrement, plus délicats, « on a fini par trouver des gens du village. On a une équipe complète. On peut sans souci laisser la maison pendant les périodes creuses ».

La barrière de la langue

Si 10 % de la population indienne parle anglais, ce n’est pas le cas de tous les habitants de ce petit village du Tamil Nadu. Certains maîtrisent un peu la langue de Shakespeare, reconnaissent Michel et Bernard, qui eux, comprennent quelques mots de tamoul. Mais à force de vivre dans ce village, « une langue commune s’est mise en place, qui permet de se comprendre ».

Faire découvrir le Chettinad

Progressivement, le Chettinad s’ouvre aux touristes. « Il y a encore 5 ans, personne ne s’arrêtait au Chettinad, les gens allaient de Tanjore à Madurai. Mais grâce au renom de la gastronomie, la région est devenue une étape. Les gens s’arrêtaient pour le déjeuner. Puis ils ont peu à peu fait une visite rapide du Chettinad, puis ils ont commencé à passer une nuit, deux nuits. »

L’occasion pour Michel et Bernard de partager avec leurs hôtes leur passion pour la région, ses bois sacrés où ont encore lieu des cultes animistes séculaires, son architecture unique, ses artisans, notamment les tisserands connus dans le monde entier pour les saris colorés qui sortent de leurs ateliers, les sculpteurs de bois…

Table d'hôtes à Saratha Vilas

Table d’hôtes à Saratha Vilas

Tout cela autour des repas que les architectes partagent avec leurs hôtes. « On a adapté la cuisine du Chettinad. C’est une cuisine assez riche et on allège en matières grasses et en sel. En fait, on cuisine des choses qu’on adore, de la cuisine indienne revisitée. Un Indien qui vient manger chez nous s’attend soit à un repas français, soit à manger quelque chose en décalage avec la tradition. Bon, c’est clair, ça ne marche pas avec un ayatollah de la cuisine strictement indienne. »

Une vie différente… mais pas plus simple qu’avant

Ouvert depuis Noël 2010, Saratha Vilas a vécu des moments difficiles : « C’est inimaginable le nombre de licences, d’impôts, de déclaration, de complexité… On ne fait pas gaffe au départ, mais le mauvais rang de l’Inde en business ease n’est pas volé. En France, la déclaration de TVA, c’était barbant. Mais ici, c’est multiplié par mille. Toutes les démarches nous prennent une énergie considérable. On voudrait évoluer plus vite, travailler à d’autres projets, mais on est absorbé par ça. Et je ne parle que des démarches de base. »

Par exemple, « pour les chambres d’hôtel, luxury tax et autres représentent 20 % du prix comme en France. Mais on doit remplir trois déclarations distinctes à chaque fois, sans compter tous les impôts indirects. Quand on fait une remise sur une chambre, la luxury tax est calculée sur le tarif plein, tandis que la service tax est proportionnelle au prix payé. »

De quoi s’y perdre, pour des étrangers et même pour des Indiens. Michel et Bernard ont eu recours à trois experts comptables avant de trouver celui qui a su reprendre en main leur comptabilité. «Mais il faut suivre de toute façon ce qui se passe. Tout le monde a fait des erreurs : la banque, l’expert comptable, le secretary company. Sauf que le responsable, c’est vous et c’est donc à vous de corriger les erreurs. Et cela peut prendre des années. »

Pas de quoi faire renoncer Michel et Bernard qui viennent d’acquérir un terrain près d’une magnifique plage de sable blanc à une centaine de kilomètres de Saratha Vilas. Leur nouvelle idée : mettre sur pied un éco-village de luxe. Une autre aventure en perspective.

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