Pondichéry et son million d’habitants, à peine : un village par rapport au reste de l’Inde. C’est là qu’Aygline de Clinchamps a échangé sa vie parisienne et son travail chez TF1 pour ouvrir… une blanchisserie. Une Française qui ouvre une blanchisserie en Inde ! L’image semblait suffisamment étonnante pour que The Indian Project s’intéresse de plus près à l’étonnant parcours d’Aygline.
Parcourir l’Inde dans tous les sens
L’idée est venue d’une expérience personnelle lors des nombreux voyages d’Aygline : « Je ne pouvais jamais donner mon linge à nettoyer. En Inde, je n’ai jamais vu de pressing, ni de blanchisserie. J’en ai parlé à des gens qui étaient installés à Pondichéry depuis longtemps. Ils m’ont tous dit :“C’est super ! Tout le monde y a pensé, personne ne l’a fait.” »
C’est avec cette idée basique qu’Aygline trouve le moyen de rester. Rien que de très normal finalement. Arrivée à Pondichéry comme simple touriste, Aygline s’y sent immédiatement chez elle : « Les bruits, les odeurs, la foule… À peine débarquée de l’avion, tout cela me semblait normal. » Elle prend alors l’habitude, à chaque vacance, de découvrir encore et encore cet immense pays.
Jusqu’à ce que le chômage la rattrape. TF1 ayant cessé de produire l’émission de jeux sur laquelle elle travaillait depuis des années, Aygline se demande si ce n’est pas l’occasion de changer de vie. Célibataire et sans enfants, volontaire dans des associations en Inde dès qu’elle a quelques semaines de congés, la jeune femme se pose la question : comment rester en Inde, et plus particulièrement à Pondichéry ?
D’où l’idée de la blanchisserie.
Une blanchisserie pour s’ancrer à Pondichéry
Entre les allers-retours en France, histoire d’être en règle avec son visa, Aygline commence à prospecter, avec une amie convaincue de l’aventure, pour trouver un lieu, acheter des machines à laver et commencer à prospecter d’éventuels clients.
Coup de chance ? Avantage de se lancer dans une petite ville comme Pondichéry ? Toujours est-il que, pour Aygline, tout se passe très naturellement. « Sincèrement, je n’ai jamais eu de problèmes administratifs. La société s’est montée en quelques semaines. Mon expert comptable est formidable. À la banque, tout se passe bien, comme avec mes propriétaires. Je n’ai pas de difficultés majeures. »
Mêmes les habituels problèmes d’alimentation électrique ou d’eau semblent avoir épargné la blanchisserie. Dans la partie indienne de la ville de Pondichéry , « nous avons une coupure tous les trois mois environs et qui ne dure jamais longtemps. Du coup, cela ne vaut même pas la peine que je prenne un générateur ».
Restent les aléas du métier : il faut être derrière les employés. « Certains sont là depuis que nous avons commencé il y a trois ans, mais il faut toujours expliquer que les draps blancs doivent être blancs et pas uniquement propres. Or pour eux, quand c’est propre, cela suffit. »
Pourtant, la blanchisserie n’est pas franchement innovante. Les machines sont des semi-professionnelles. « Les professionnelles sont tellement grandes qu’elles n’auraient pas pu rentrer dans le local. Il aurait fallu démonter la porte et encore, je ne suis pas sûre que ça aurait été suffisant. »
Et une passion pour le patrimoine local
Mais il n’y a pas que la blanchisserie dans la vie indienne d’Aygline. Dès son premier séjour à Pondichéry, il y a 8 ans, la jeune femme avait été séduite par Notre-Dame-des-Anges, l’église française de Pondichéry, mise à mal par l’air marin et l’érosion. Une fois sur place, il ne lui faut pas tellement de temps pour rejoindre les Amis du patrimoine pondichérien. Elle fait le lien avec les Vieilles Maisons françaises (VMF), qui s’intéressent de près à la rénovation de l’édifice. Après plusieurs années de travaux de restauration – « un travail magnifique » insiste Aygline –, l’église est aujourd’hui restaurée grâce aux efforts soutenus des Amis du patrimoine pondichérien, des Vieilles Maisons françaises et du curé de la paroisse de l’époque, le père Michael John.
C’est aussi ce projet qui amène à Aygline ses premiers clients. « Grâce aux Amis du patrimoine pondichérien, j’ai rencontré Francis Wacziarg, le fondateur de la chaîne d’hôtels Neemrana, qui était à la tête des VMF Inde. Eux-mêmes étaient en lien avec les VMF qui, de leur côté, travaillaient avec les Amis du patrimoine pondichérien. Et c’est ainsi que Neemrana a été notre premier client. Francis était quelqu’un de formidable. Il encourageait toujours ce genre d’entreprise. Je l’appréciais énormément ». Avec un premier client aussi prestigieux, « je n’ai jamais vraiment eu besoin de démarcher les clients. Ils sont tous venus directement vers moi. Aujourd’hui, ça se passe bien. »
Il faut dire aussi qu’Aygline sait faire la différence avec la concurrence , qui reste assez faible : des draps propres, blancs, qui sentent bons – Aygline y tient – et livrés dans les délais promis. « Le niveau d’exigence peut varier selon les hôtels. Mais pas le mien. »
Et pour la suite ?
Aygline envisage l’avenir avec sérénité. « J’aimerais développer mon activité, avoir plus de clients. Pour le moment, je suis à Pondichéry, Par la suite, j’irai peut-être m’installer ailleurs. J’adore aller à Chennai. Cela me fascine, toute cette foule, ce mouvement et le fait que le pays soit si grand. Et elle ajoute : « J’aime ma vie à Pondichéry. J’ai échangé douze ans dans l’audiovisuel pour ça et je sais que j’ai bien fait. Car en Inde, tout est possible. »
(2 commentaires)
quelle belle histoire… ça fait rêver… Gervaise aux Indes aurait été une femme heureuse!
Oui belle histoire ! Cela donne de l’espoir aux Français qui veulent s’installer en Inde..avec un vrai projet. Moi j’y réfléchis, mais je sais pas encore où ? Je vais me rendre a Pondichéry d’ici novembre 2019.. si l’on avait pu se rencontrer. Merci . Sonia