Gourmandise et business peuvent faire très bon ménage. La preuve avec Harsh Shodan qui a lancé son atelier, The Gourmet Kitchen and Studio, pour satisfaire à la fois sa passion de la cuisine et son goût pour les affaires.
De sauce en cuiller…
Avant de vivre de sa passion pour la cuisine, Harsh Shodan était à la tête d’un centre d’appels qui travaillait avec les marchés européen, anglophone et américain.
En poste 14h à 3h du matin afin de suivre le rythme des pays occidentaux, il sent que sa vie de famille et sa santé commencent à pâtir de ce rythme décalé. Au bout de 8 ou 10 ans, Harsh décide de tout arrêter pour se lancer dans une nouvelle aventure.
Son activité de critique gastronomique est à l’origine de son entreprise. Harsh écrit en effet pour un blog de critiques de restaurants. Il tente même à un moment de lancer son propre site – avant de se rendre compte de la difficulté à faire ce travail seul.
Le déclic a eu lieu lorsqu’on lui a demandé de tourner des vidéos de la préparation de ses recettes, un vrai succès. Pour ne pas être envahi par la quantité de mets qu’il cuisinait chez lui, il a commencé à distribuer les plats qu’il préparait à ses amis et à sa famille. De fil en aiguille, les commandes sont arrivées.
C’est ainsi qu’a débuté The Gourmet Kitchen and Studio en 2012. Aujourd’hui, la boîte fonctionne autour de trois axes :
- une activité classique de traiteur, qui propose de prendre en main l’organisation complète de réceptions (matériel, vaisselle, approvisionnement, mise en place, etc.).
- très vite sont venus se greffer des ateliers de cuisine (« Soup Salad & Quiche class », « Basic Indian »…) dans son laboratoire de Lower Parel.
- Aujourd’hui, l’atelier accueille aussi des dîners réalisés par un chef et rassemblant une douzaine de personnes.
Fusion food, sauce veggie
Harsh assure aussi toute la partie créative de The Gourmet Kitchen, à partir de livres, de recettes de grands chefs, mais aussi de son entourage lui donne souvent des conseils et des tuyaux.
Ses clients, âgés de 25 à 60 ans, viennent des classes aisées et des classes moyennes aisées (upper middle class). Les habitudes évoluent : au-delà de 60 ans, les gens sont habitués à cuisiner de façon traditionnelle, c’est-à-dire à tout faire chez soi, et à choisir des mets dans le vaste répertoire de la cuisine indienne.
Or The Gourmet Kitchen ne se focalise pas sur la cuisine indienne traditionnelle, mais sur des cuisines modernes, végétariennes, marquées par des traditions culinaires étrangères (française, japonaise, italienne…). Ce qui implique, bien entendu, de s’adapter au goût très spécifique des Indiens.
Dans la traditionnelle quiche lorraine, les œufs remplacés par du paneer. Harsh n’hésite pas à ajouter quelques épices dans ses recettes. Sans aller jusqu’aux saveurs pimentées de la cuisine indienne, il sait que ses clients seraient déçus par la fadeur de certains plats occidentaux. Aussi fait-il des compromis, comme de recourir à des épices telles que le paprika (qui a l’avantage d’ajouter du piquant sans modifier le goût des ingrédients), la cannelle ou encore certaines herbes.
Et pour être tout à fait sûr de lui, pour tester ses nouveautés, Harsh organise régulièrement des dégustations allant de quelques dizaines de personnes à 200 convives.
Entreprendre, le rêve de tout Indien
« Tout Indien rêve de monter son propre business : que l’on soit employé, cadre ou fonctionnaire, chacun a toujours ce rêve » estime Harsh.
Or, pour monter sa boîte, il faut être passionné : rien n’est possible sans passion.
Et, bien sûr, il faut disposer d’un minimum de fonds, être capable de mener une boîte, de gérer son business, prendre des risques, tant sur le plan financier que mental. Bien sûr, il faut des associés. « Mes associés ne sont pas impliqués dans la vie quotidienne de la boîte : ce sont d’abord des partenaires financiers auxquels je rends compte une fois par mois environ. Ils me laissent les mains libres pour gérer l’entreprise.«
Lorsqu’il a décidé de vivre de sa passion, Harsh a commencé à travailler de chez lui, pour limiter les frais. Avoir son propre atelier, employer une dizaine de personnes à plein temps, ainsi que des extras, ce sont autant de frais fixes chaque mois. Il lui faut donc être capable de générer un certain volume d’affaires pour y faire face.
Or, dans la cuisine, il faut continuellement sortir des nouveautés, se réinventer. Outre la publicité directe, lors des réceptions qu’il organise, il utilise beaucoup les réseaux sociaux (Facebook, Twitter…), caisse de résonnance irremplaçable pour ce genre d’activité qui marche sur le bouche à oreille et la confiance.
Avant de se lancer, connaître le pays
Les gens qui viennent en Inde doivent passer du temps pour connaître le pays, savoir ce que les gens apprécient, ce qu’ils veulent. Cela demande un temps d’étude, d’observation. La durée de cet effort diminue lorsque l’on trouve un partenaire indien.
L’Inde semble être un marché immense et très lucratif, mais il n’a rien à voir avec les autres marchés. Les clients sont très exigeants, notamment en matière de restauration. Voyageant de plus en plus, les Indiens découvrent le goût des pâtisseries à l’étranger. « Il existe un vrai marché pour les cuisines étrangères dans les zones urbaines de l’Inde. Ne reste qu’à s’en saisir. »